Savez-vous manger des choux?

Lors du petit jeu que je vous ai concocté pour le temps des fêtes, des participantes mentionnaient reconnaître le criocère du lys – un joli coléoptère rouge peu aimé des jardiniers! J’ai remarqué dans le cadre de mon blogue que les insectes indésirables – qu’il s’agisse de ceux envahissant nos plates-bandes ou nos demeures – sont généralement ceux qui suscitent le plus d’intérêt de la part des lecteurs. Il est vrai que ces arthropodes nous obligent parfois à faire des démarches supplémentaires pour contourner voire contrôler les dommages qu’ils occasionnent.

Pour rester dans ce thème, je pensais bon vous entretenir au sujet d’un papillon très commun dont la larve se délecte de nos plants potagers bien-aimés. Il s’agit d’un insecte si abondant qu’il est également l’un des premiers arthropodes que beaucoup d’entre nous avons appris à connaître.

De qui s’agit-il? C’est la piéride du chou, Pieris rapae, aussi appelée piéride du rave ou piéride de la rave dans certaines des sources consultées (ces dernières précisant que le nom « piéride du chou » devrait plutôt être réservé à son cousin européen Pieris brassicae).

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La piéride du chou, un papillon très commun!
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Autre individu

Qui n’a jamais vu ce papillon de taille moyenne (envergure de 3 à 5 cm) butiner dans ses plates-bandes? Certains auront aussi fait connaissance avec ses larves – des chenilles arborant fièrement le vert – qui, comme le nom de l’espèce l’évoque, se délectent de végétaux appartenant à la famille des crucifères. Leur menu est vaste et comprend chou, brocoli, navet, capucines, moutarde sauvage et noire, de même que de multiples crucifères indigènes.

C’est fort probablement cette espèce qui est en cause dans une aversion au brocoli dont mon père est atteint! Il y a déjà plusieurs années de cela, ma mère cultivait du brocoli dans son jardin. Ce n’est qu’après avoir mangé de multiples pousses que mes parents se rendirent compte que le légume en question était infesté de petites chenilles dont la robe verte était exactement de la même couleur que l’aliment ingéré. Bref, ils avaient sans doute déjà mangé quelques chenilles! Depuis, mon père grogne à la vue de brocoli dans son assiette, comme le ferait un enfant à qui l’on veut faire manger tous ses légumes!

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Probablement des chenilles de la piéride du chou

J’ai moi-même fait la rencontre de ces chenilles. Il y a quelques années de cela, j’étais chargée de photographier des légumes du potager de la table jeunesse du ministère auquel j’appartenais. J’avais alors pris des clichés de quelques chenilles en plein délit de gourmandise. La chenille de la piéride du chou se distingue des autres espèces de piérides par la présence d’une fine ligne jaune pointillée sur les flancs. Cette caractéristique est à remarquer si jamais vous rencontrez des chenilles vertes sur vos légumes et que vous cherchez à les identifier! Je crois percevoir cette fine ligne sur certaines de mes photographies (dont une qui accompagne la présente chronique), mais la résolution de l’appareil que j’utilisais à l’époque ne me permet pas de le confirmer sans aucun doute.

Bien que les chenilles se confondent parfaitement avec leur source de nourriture, les adultes, eux, sont nettement moins discrets. Très actifs et majoritairement vêtus de blanc, ils contrastent avec les plantes sur lesquelles ils se posent pour butiner. C’est ainsi qu’on peut les observer et les photographier sans trop de difficultés. Plus nerveux que certains de leurs confrères lépidoptères, je ne suis néanmoins jamais parvenue à en manipuler un… ni à m’approcher à plus de 1 ou 2 pieds d’un individu sans le faire déguerpir.

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Dommages causés par les chenilles

Les piérides du chou sont faciles à identifier. Leur robe toute blanche est ponctuée de quelques taches noires caractéristiques. Plus précisément, en vue dorsale, la pointe des ailes antérieures des deux sexes est bordée de noir. De plus, le centre de l’aile des mâles est flanqué d’un point noir (cet exemple), alors que les femelles en possèdent deux (cette photo). Toujours en vue dorsale, les ailes postérieures des deux sexes sont munies d’un point, parallèle à ceux des ailes antérieures. Lorsqu’on examine la face ventrale, cependant, les deux genres possèdent deux taches sur les ailes antérieures; il faut donc avoir une vue dorsale pour bien identifier le sexe des spécimens observés. En outre, cet agencement de taches est propre à l’espèce P. rapae et évite la confusion avec les autres Pieridae du Québec.

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On reconnaît la femelle par les deux taches noires sur l’aile antérieure

Si la piéride du chou est si commune, c’est qu’elle a pu s’adapter avec brio à un environnement nouveau. En effet, notre joli papillon a été introduit au Québec vers 1860 et s’est ensuite étalé sur l’ensemble de l’Amérique du Nord. Son aire de distribution couvre maintenant tous les états américains, hormis l’Alaska, de même que les zones tempérées et boréales du Canada.

Ce lépidoptère affectionne les milieux ouverts, qu’ils soient naturels (prés, orées des bois, marais, rivages, etc.) ou anthropisés (terrains vagues, jardins, parcs urbains, etc.). Aussi, trois générations se chevauchent entre la mi-avril et le début d’octobre pour le Québec méridional. Il est donc très probable que vous observiez à nouveau ce papillon extrêmement commun, de même que sa chenille, une fois la saison chaude de retour. D’ailleurs, si jamais vous voyez des chenilles de cette piéride dans votre potager, dites-leur bonjour de la part de mon père!

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