Il est fréquent que mes parents et amis me transmettent des photographies d’invertébrés à identifier.
Bien que je ne sois pas une entomologiste professionnelle, je m’amuse souvent à tenter d’identifier les individus croqués sur le vif. Cela me permet d’en apprendre davantage moi-même au sujet de groupes d’organismes que je n’ai pas encore rencontrés, puis de partager mes découvertes.
Il y a quelques jours, lorsque ma mère me transmit une photo d’une chenille qu’elle avait observée au début du mois de novembre, je sus immédiatement de quelle espèce il s’agissait.
C’était un joli arthropode coloré que je n’avais pas eu la chance d’observer moi-même jusqu’à maintenant: une chenille du sphinx du gaillet (Hyles gallii).
D’assez grande taille, cette chenille peut atteindre 70 millimètres à maturité. Sa robe varie du beige au noir en passant par le vert. Elle est munie d’une corne rouge ou noire au bout de son abdomen, ce qui aide à l’identifier (la corne est une caractéristique propre à la famille des sphinx). Elle se reconnaît également par la présence de taches plus pâles sur ses segments abdominaux.
L’adulte quant à lui, constitue un fort joli papillon de taille moyenne (voir cette photo tirée de BugGuide).
Les plantes favorites de la chenille incluent des végétaux de la famille des onagracées, tels les épilobes, et des rubiacées, dont les gaillets, d’où le sphinx tire son nom. Selon Wagner 2005, les chenilles matures font toutefois moins la fine bouche et peuvent se délecter d’autres types de plantes.
Les habitats privilégiés par cette espèce comprennent les milieux ouverts ou semi-ouverts tels que les champs, les prés abandonnés, les friches, les milieux humides ou les tourbières.
Selon Handfield 2011, les plantes hôtes de cette espèce sont communes et répandues sur le territoire du Québec, faisant en sorte que les adultes sont sans doute plus communs que ce que laissent paraître les données. En effet, ce dernier indiquait que les adultes étaient plutôt occasionnellement rencontrés au Québec, affirmation appuyée par Beadle et Leckie en 2012 concernant leur situation en Amérique du Nord. Cependant, Normandin mentionne dans son ouvrage publié en 2020 que cette espèce est commune; il faut croire que l’avancement de la science a permis de cumuler davantage d’informations, au courant des dernières années, sur la présence de cette espèce au Québec.
La période de vol des adultes s’étale de la fin du mois de mai à la première semaine d’août. Pour ce qui concerne les chenilles, on peut les voir se déplacer de la mi-août à la fin du mois d’octobre, période à la fin de laquelle elles se chercheront un refuge pour passer l’hiver. Pour ce faire, elles s’enfouiront dans le sol meuble, y effectueront leur métamorphose et traverseront les rigueurs de l’hiver sous forme de chrysalide.
La chenille que ma mère a photographiée au début du mois de novembre devait en être à ses derniers déplacements avant l’hiver.
Espérons qu’elle se soit trouvé un refuge et qu’on puisse l’observer sous forme adulte au printemps venu!
Pour en savoir plus
- Beadle, D. et S. Leckie. 2012. Peterson field guide to moths of Northeastern North America. 611 p.
- Bug Guide. 2005. Species Hyles gallii – Galium Sphinx – Hodges#7893. https://bugguide.net/node/view/31976 (page consultée le 13 décembre 2020).
- Dubuc, Y. 2007. Les insectes du Québec. 456 p.
- Handfield, L. 2011. Guide d’identification – Les papillons du Québec. 672 p.
- Leboeuf, M. et S. Le Tirant. 2018. Papillons de nuit et chenilles du Québec et des Maritimes. 335 p.
- Normandin, E. 2020. Les insectes du Québec. 620 p.
- Wagner, D.L. 2005. Caterpillars of Eastern North America. 512 p.
- Wikipédia. 2019.
Merci pour vos excellentes chroniques. Elles sont très bien écrites. Un plaisir à lire.
Vous dites que le sphinx de Gaillet est un papillon. Le néophite que je suis aurait été tenté de l’appeler « mite » plutôt que papillon. Trapu, assez gros corps, couleurs ternes…
Est-ce que vous sauriez d’ou je prendrais ça ? Avons-nous eu cette tendance au Canada français, ou est-ce tout simplement une erreur de ma part?
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Bonjour!
Merci pour vos commentaires, ils sont appréciés!
Pour ce qui est du terme « mite », je l’utilisais pour ma part plus jeune pour désigner de petits papillons de nuit. Sur Wikipédia, on indique « Le mot mite est un nom vernaculaire, regroupant en français différentes populations de petits papillons de nuit (insectes de l’ordre des lépidoptères et anciennement, du sous-ordre des hétérocères), ayant en commun leur caractère nuisible pour l’activité humaine. » (voir: https://fr.wikipedia.org/wiki/Mite).
Peut-être ce terme a-t-il été utilisé dans certaines régions québécoises pour désigner les papillons de nuit de façon générale? Ce qui serait votre cas, si j’ai bien compris!
Cela étant dit, le sphinx du gaillet est bel et bien un papillon (ordre des lépidoptères), mais il s’agit plus spécifiquement d’un papillon nocturne. Il est par contre plus gros que ce que les gens désignent habituellement comme étant des mites (comme par exemple les mites des vêtements dont j’ai déjà parlé ici: https://docbebitte.com/2015/02/16/des-tricoteuses-miniatures/).
J’espère que ces explications vous éclaireront!
Au plaisir! DocBébitte
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Merci beaucoup de cette information. Ce que vous ajoutez à ce que je croyais savoir c’est que le mot « mite » désigne un animal nocturne. Pour moi dans mon coin de pays (l’Ontario), ce mot indiquait l’apparence (forme et couleur) de l’animal plutôt que ses manières. Un papillon n’avait jamais un gros corps.
J’ajuste alors ma définition!
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