Le bruit court dans les médias. La prochaine émergence massive d’une espèce de cigale périodique du genre Magicicada est imminente. Cette cigale n’émerge de la terre, pour devenir un adulte ailé, qu’une fois tous les 17 ans. Et cette année est la bonne pour l’est des États-Unis.
Les cigales font partie de l’ordre des hémiptères. On en retrouve environ une centaine d’espèces en Amérique du nord. Elles ne sont pas toutes périodiques comme celles appartenant au genre Magicicada.

Les larves de cigales (qu’on appelle des nymphes) se développent sous terre. Elles sont munies « d’avant-bras » larges et dentelés, très utiles pour se frayer un chemin sous terre. Elles se nourrissent de la sève circulant dans les racines des arbres, qu’elles aspirent à l’aide de leur rostre (long appendice buccal, également retrouvé chez d’autres hémiptères comme les cercopes). Elles peuvent demeurer sous terre de 2 à 17 ans, selon l’espèce!
Lorsqu’elles émergent du sol, elles grimpent le long d’une surface à laquelle elles s’accrochent (végétale, minérale, de nature humaine, peu importe!), puis amorcent leur métamorphose. Leur membrane extérieure, que l’on appelle exosquelette, se solidifie, puis se fend pour laisser sortir un adulte ailé. L’exosquelette du nouvel adulte est, à ce stade, très tendre et il prendra un certain temps avant de se durcir (jusqu’à quelques jours selon l’espèce).

Une fois la métamorphose complétée, les mâles se mettent à chanter pour, bien sûr, attirer des femelles! C’est en faisant vibrer des membranes situées sur leur abdomen – appelées des cymbales abdominales – qu’ils parviennent à émettre leur son caractéristique. Qui n’a pas entendu de cigales chanter lors d’une belle journée d’été?
Les espèces communément retrouvées au Québec sont des cigales dites annuelles. Elles n’émergent pas de façon périodique comme les individus appartenant au genre Magicicada. Bien qu’elles passent plusieurs années sous terre (2 à 5 années), les différentes cohortes émergent graduellement, année après année. Les cigales annuelles sont également plus tardives que les cigales périodiques et on les observe donc plus tard pendant l’été. C’est d’ailleurs en plein mois d’août que ma mère a saisi de magnifiques clichés d’une espèce commune au Québec – et également celle qui est la plus commune dans l’est de l’Amérique du Nord: la cigale caniculaire (Tibicen canicularis). Vous pouvez apprécier ces photographies dans le présent article.

Revenons à nos Magicicada. Certaines espèces de ce groupe émergent tous les 13 ou 17 ans. Pourquoi donc n’émerger qu’une fois avoir passé de si nombreuses années sous terre? Ou encore, pourquoi est-ce que toutes les larves d’un secteur plutôt vaste (à l’échelle de quelques états américains) émergent de façon simultanée? En effet, les densités atteintes par ces cigales, au moment de leur émergence, sont surprenantes. Jusqu’à 1,5 million d’individus par acre (un peu plus de 370 millions par kilomètre carré) a été mesuré! Cette densité phénoménale, combinée au long cycle de vie, leur permet d’échapper aux prédateurs. Il semblerait que les densités soient si élevées que les prédateurs finissent par être complètement repus, et ce, même s’il reste encore des centaines de millier de cigales en circulation! Et, comme le cycle de ces cigales est long et irrégulier (nombres impairs et premiers), les prédateurs ne peuvent facilement ajuster leur cycle de vie en conséquence.
Les Magicicada émergent du sol lorsque celui-ci atteint environ 64 degrés Fahrenheit (environ 18 degrés Celsius). Elles émergent donc plus tôt dans les états du sud (fin avril en Caroline du sud) et plus tard dans les états plus nordiques (juin au Michigan). Au moment même où vous lisez cet article (avril 2013), leur émergence est imminente!
Si vous vous intéressez aux cigales périodiques, sachez que des cartes affichant les endroits et les moments prévus des prochaines émergences sont disponibles sur Internet. Plusieurs cohortes, qui n’émergent pas durant la même année, sont réparties à travers les États-Unis. Il est donc possible d’assister à ces émergences sans attendre dans 17 ans!
Pour en savoir plus
- Dubuc, Y. 2007. Les insectes du Québec. 456 p.
- Marshall, S.A. 2009. Insects. Their natural history and diversity. 732 p.
- McGavin, G. 2000. Insectes – Araignées et autres arthropodes terrestres. 255p.
- Bugguide (cigale caniculaire): http://bugguide.net/node/view/12461
- Bugguide (Magicicada) : http://bugguide.net/node/view/6970
- Cicada Mania (Magicicada) : http://www.cicadamania.com/
- Magicicada.org (Magicicada) : http://magicicada.org/magicicada_ii.php
- National Geographic (Émergence de Magicicada en 2013) : http://news.nationalgeographic.com/news/2013/03/130329-cicadas-coming-sky-locust-swarm-animal-science/
- University of Michigan (Magicicada): http://insects.ummz.lsa.umich.edu/fauna/michigan_cicadas/periodical/index.html
- Wikipédia, en français (Cicadidae) : http://fr.wikipedia.org/wiki/Cicadidae