Concours de photo 2017 – Partie 1 : Le Vulcain qui émerge dans une maison, par Sylvie Benoit

Photographie gagnante représentant un Vulcain
Photographie gagnante représentant un Vulcain

C’est avec plaisir que je vous diffuse la première de deux chroniques au sujet des photographies gagnantes ex aequo du concours amical de photographie DocBébitte 2017. Comme je le mentionnais lors de la chronique révélant nos gagnants – et tel que promis chaque année – je me suis affairée à vous concocter la petite histoire derrière les clichés élus.

Cocon et exuvies des chenilles retrouvés au sous-sol
Cocon et exuvies des chenilles retrouvés au sous-sol
Chenille, également retrouvée dans la maison chez Sylvie
Chenille, également retrouvée dans la maison chez Sylvie
La chenille se tisse un nid douillet
La chenille se tisse un nid douillet

La photo transmise par Sylvie Benoit relate justement une rencontre inopinée avec un joli papillon commun nommé « Vulcain » (Vanessa atalanta). Ce lépidoptère appartient à la grande famille des nymphalidés. C’est un cousin du papillon Belle dame (Vanessa cardui) que vous connaissez sans doute, car il a fait les manchettes en septembre dernier, étant aperçu en vastes hardes un peu partout au Québec.

Le Vulcain se reconnait facilement par ses ailes sombres flanquées d’une bande orangée surmontée de taches blanches. Son nom scientifique, Vanessa atalanta, référerait à une héroïne grecque « Atalanta » ou « Atalante » qui, selon la légende, était une coureuse fort rapide. Le Vulcain aurait vraisemblablement hérité de ce nom à cause de son vol, reconnu pour être rapide.

Le cliché gagnant a été effectué à l’intérieur d’une demeure. Trois papillons de cette espèce y ont été retrouvés par surprise! Quelques recherches effectuées par les propriétaires des lieux leur ont permis de résoudre le mystère : les restes de chrysalides et d’exuvies de chenilles furent découverts au sous-sol. Des chenilles avaient été introduites à l’intérieur de la maison par le biais de plants d’orties, qui y avaient été amenés pour sécher. À cet effet, Sylvie me transmit gracieusement quelques photographies supplémentaires appuyant ces observations. Elles complètent la présente chronique.

La livrée de la chenille du Vulcain est variable. Selon Wagner (2005), certains individus sont plus pâles (couleur blanchâtre à jaune verdâtre), alors que d’autres arborent une robe nettement plus sombre. Les individus croqués sur le vif par notre gagnante représentent des spécimens foncés, également caractérisés par la présence de lignes blanchâtres parcourant les flancs. De plus, les chenilles sont munies de poils et d’épines acérés, s’élevant d’une protubérance orangée, ce qui leur donne une apparence très piquante! Qui osera y mettre les doigts?

Sans grande surprise, les chenilles se délectent de plantes appartenant à la famille Urticaceae, dont – eh oui – les orties! Elles se tissent un nid douillet dans le repli des feuilles, comme en témoigne une des photographies qui agrémentent la présente chronique.

Vulcain que j’avais pris en photo il y a quelques années
Vulcain que j’avais pris en photo il y a quelques années

Les adultes, quant à eux, sirotent le nectar de multiples espèces de fleurs; ils s’alimentent également de fruits et de détritus en décomposition. Comme ce sont de bons butineurs, il est facile de les voir dans nos jardins, particulièrement lors des mois de mi-mai à juillet (première génération) ou encore de mi-juillet à mi-septembre (deuxième génération). Les Vulcains aiment aussi se prélasser au soleil sur tout support situé au ras du sol (roche, tronc d’arbre, etc.), où l’on peut prendre le temps de les observer. C’est ainsi que j’avais pris quelques clichés de ce sympathique papillon, m’approchant peu à peu du sujet. Le Vulcain, pas trop nerveux, se laisse d’ailleurs approcher pour être admiré. La photographie de Sylvie en est un bel exemple! Bravo à notre première gagnante!

 

Pour en savoir plus

  • Bug Guide. Species Vanessa atalanta – Red Admiral – Hodges#4437. http://bugguide.net/node/view/448
  • Dubuc, Y. 2007. Les insectes du Québec. 456 p.
  • Espace pour la vie. Vulcain. http://espacepourlavie.ca/insectes-arthropodes/vulcain
  • Handfield, L. 2011. Guide d’identification – Les papillons du Québec. 672 p.
  • Leboeuf, M. et S. Le Tirant. 2012. Papillons et chenilles du Québec et des Maritimes. 391 p.
  • Wagner, D.L. 2005. Caterpillars of Eastern North America. 512 p.

Familiers Nymphalidés

Amiral 1
Amiral
Belle-Dame1
Belle dame, soumise lors du concours de photographie 2013 DocBébitte

Que vous soyez entomologiste amateur ou non, vous avez sans doute déjà passé quelques instants à contempler un joli papillon volant de fleur en fleur. Les papillons ont la cote auprès de tous et ce n’est pas pour rien : gracieux, colorés, souvent de bonne taille, ils sont faciles à admirer.

Il y a de bonnes chances que le papillon que vous contempliez fasse partie de la famille des Nymphalidés (Nymphalidae). Ce groupe est effectivement le plus nombreux en nombre d’espèces : 51 espèces au Québec selon Leboeuf et Le Tirant 2012. Dans le monde, ce sont environ 6 000 espèces qui sont retrouvées. Au Québec, cette famille comporte des individus de taille moyenne ou grande dont l’apparence est fort variée. Les couleurs sont souvent vives (le orange est courant), quoique certaines espèces revêtent également des robes plus sobres dans les teintes de brun (c’est le cas des Satyres). Le dos des ailes, quant à lui, est habituellement plus discret et permet aux papillons plus colorés de « disparaître » de la vue de potentiels prédateurs.

Vous vous demandez sans doute qui sont ces Nymphalidés? Certains d’entre eux sont très connus, car ils visitent nos plates-bandes sans gêne : Croissant nordique, Monarque, Amiral, Vulcain, Belle dame, Vice-roi et j’en passe! Saviez-vous que le fameux Morpho bleu – rendu célèbre par le film « Le Papillon bleu » résumant l’aventure qu’a vécue David Marenger avec Georges Brossard – fait partie de cette famille?

Croissant nordique_2
Croissant nordique
Chrysalide non identifiée 1
Une chrysalide de Nymphalidé, possiblement de Phyciodes sp. selon les bons conseils de collègues entomologistes
L. Leclerc_2
Monarque, soumis lors du concours de photographie 2014 DocBébitte

Une façon simple de reconnaître un Nymphalidé, c’est d’examiner ses pattes antérieures. Cette première paire de pattes est atrophiée, faisant en sorte que ces papillons se déplacent sur quatre pattes! Or, si elles ne servent pas à se balader, à quoi peuvent-elles bien servir? Il semblerait que cette paire de pattes ait plutôt une fonction gustative afin de « tester » la nourriture potentielle! Goûter avec ses pieds… Particulier, n’est-ce pas?

Les chenilles sont variées. Plusieurs portent de petites épines sur le dos. Certaines sont plutôt lisses, alors que d’autres ressemblent à des fientes d’oiseaux, comme la chenille de l’Amiral, par exemple. Finalement, la chenille du Monarque arbore de belles rayures jaunes, blanches et noires. Difficile à manquer! Quant aux chrysalides, celles-ci présentent également des formes et des motifs variés.

L’été dernier, j’ai eu la chance de prendre une vidéo (et quelques photos, bien sûr!) d’une chrysalide qui appartiendrait à un individu de la famille des Nymphalidés. La bête en question avait décidé de procéder à sa métamorphose sur le rebord de ma piscine creusée, dont le niveau d’eau était alors abaissé (et oui, encore des réparations de piscine – voir cette chronique et vous comprendrez!). Étant donné que je ne suis pas encore habilitée à identifier des chrysalides, ce sont des collègues entomologistes qui m’ont proposé qu’il pourrait s’agir d’une chrysalide du genre Phyciodes (Croissants). Sur la photo, l’on est capable de voir les « restes » de la chenille qui, de toute évidence, portait de petits poils et épines. Aussi, le fait que mes plates-bandes sont envahies par des Croissants nordiques pendant l’été appuie largement l’hypothèse qu’il s’agissait d’un membre de ce groupe. À la fin de la présente chronique, vous pouvez visionner une petite vidéo où l’on voit la chrysalide « gigoter » lorsque je la touche. Fascinant!

Une fois sortis de leur chrysalide, les Nymphalidés ont habituellement une assez bonne longévité qui peut se compter en nombre de mois chez plusieurs espèces (neuf mois chez le Monarque!).

Vulcain
Vulcain
Satyre perlé
Satyre perlé qui est presque passé inaperçu!

Les stratégies utilisées pour survivre à l’hiver sont diverses. Certaines espèces, comme le Monarque, la Belle dame et le Vulcain, migrent vers le sud. D’autres passent l’hiver à l’état adulte, cachés dans les abris qu’ils peuvent trouver (ce qui inclut les cordes de bois et les cabanons, selon Dubuc 2007). C’est le cas du Morio, qui est l’un des premiers papillons que l’on peut apercevoir au printemps – aussi tôt qu’en avril, alors qu’il y a encore de la neige au sol! Enfin, plusieurs espèces traversent l’hiver sous forme de larves qui sont capables de geler, sans pour autant en souffrir. Chez les représentants de la sous-famille Satyrinae, les chenilles opteraient pour une stratégie visant à déshydrater leurs tissus corporels, puis geler complètement comme des cubes de glace!

En somme, cette famille nombreuse comporte des individus à l’apparence et au comportement variés, qu’ils soient au stade adulte ou à l’état larvaire. Si le sujet vous intéresse et que vous voulez en savoir plus sur les différentes sous-familles, j’ai mis la main sur un site Internet intéressant du Système canadien d’information sur la biodiversité. Il y a aussi, bien sûr, de très bons livres que vous pouvez vous procurer et qui sont cités ci-dessous! Bonne lecture!

 

Vidéo. Chrysalide de Nymphalidé qui bouge lorsque je la touche.

 

Pour en savoir plus