Festival des insectes de Québec – Édition printemps 2023

Le Festival des Insectes s’est tenu à nouveau ce printemps à l’Aquarium du Québec, à Québec. Il s’agit d’un événement familial où l’on peut observer, toucher… et même manger des insectes !

L’édition de ce printemps met en vedette le Pérou. On y rencontre notamment un duo de musiciens péruviens, ainsi que Pierre-Olivier Ouellet, qui nous fait voyager dans ce pays sud-américain.

Le tout sans oublier les autres « bébittes » retrouvées autour du globe !

Faites le voyage avec moi en visionnant la capsule YouTube de ma journée !

Déclin mondial des insectes : est-il minuit moins une ?

La biodiversité.

Un sujet dont on entend beaucoup parler.

Un sujet simple, me diriez-vous ?

Lorsque j’ai décidé d’écrire un billet de blogue sur le déclin de la biodiversité des insectes, je n’avais pas réalisé dans quoi je m’embarquais !

En décembre dernier, la « COP15 » était largement couverte dans les médias. À ce moment, je suis tombée sur d’intéressants articles sur le sujet, dont plusieurs partagés sur LinkedIn. Voulant battre le fer pendant qu’il est chaud, j’ai saisi l’opportunité pour me documenter davantage en vue d’une prochaine publication.

Le sujet s’avéra bien plus riche encore que je le croyais.

Par ailleurs, au moment d’écrire ces premières lignes, je sors d’une visioconférence, animée par nulle autre que Jean Lemire (Mission Antarctique, entre autres), qui touche elle aussi la protection de la biodiversité. Inspirant, tout cela !

Par où commencer ?

Vous avez entendu parler de la COP15 ? J’avais déjà entendu parler de « COP » touchant les changements climatiques, mais d’autres existent. La COP15 dont je vous entretiens ici, c’est la 15e Conférence des Parties à la Convention sur la diversité biologique des Nations Unies. Tenue à Montréal en décembre 2022, elle rassemblait des gouvernements du monde entier. Lieu de négociations et d’adoption de plans stratégiques, son objectif ultime était de créer un nouveau cadre mondial pour freiner la perte de la diversité de la vie sur la planète, rien de moins !

Mais pourquoi accorder tant d’importance à la biodiversité ?

Les recherches des dernières années tendent à démontrer qu’il y a un déclin global de la biodiversité des organismes vivants sur notre planète. Certes, quelques espèces profitent de niches libérées par d’autres et prolifèrent. Mais, globalement, il semble y avoir d’importantes pertes.

Et nos insectes bien-aimés ne font pas bande à part.

Dans la littérature, on retrouve différentes statistiques : population globale d’insectes qui diminue de 2 % par année (Janicki et collab., 2022), taux dramatiques qui pourraient conduire à l’extinction de 40 % des espèces d’insectes du globe dans les prochaines décennies (Sánchez-Bayo et Wyckhuys, 2019), et j’en passe !

Cette tendance est également observée au Canada et au Québec, où les papillons et les coléoptères figurent au palmarès d’insectes dont le plus grand nombre d’espèces endémiques sont présumées disparues.

Les pollinisateurs nous rendent des services inestimables. Sans eux, nous aurions peu d’aliments pour nous sustenter !

Un déclin qui préoccupe

Pourquoi ce déclin est-il si préoccupant ?

C’est que les insectes et autres invertébrés jouent un rôle indispensable dans les écosystèmes planétaires :

  • Ils sont à la base des chaînes alimentaires terrestres et aquatiques. Ils soutiennent donc une vaste panoplie d’animaux qui, à leur tour, nous nourrissent, nous habillent et nous permettent de survivre.
  • Ils décomposent les fèces, les plantes mortes et les carcasses d’animaux. Ils contribuent ainsi au recyclage des nutriments essentiels à la croissance des plantes et, une fois de plus, à notre subsistance !
  • Ils régulent les pestes en milieu agricole. En se nourrissant d’autres invertébrés qui sont des ravageurs de cultures, ils permettent d’épargner des milliards de dollars en dégâts ou en achats de pesticides.
  • Ils pollinisent les plantes. 87 % de toutes les espèces de plantes et 75 % des plantes de cultures nécessitent d’être pollinisées; ce sont les insectes qui jouent majoritairement ce rôle. Sans eux, la plupart de nos aliments n’existeraient tout simplement pas.
  • Ils contribuent à la fertilité des sols. En aérant et réarrangeant le sol, ils permettent une meilleure rétention de l’eau et des nutriments.

L’importance des insectes est donc indéniable.

Parmi les sources que j’ai consultées, plusieurs illustrent l’importance des insectes par rapport à tous les autres organismes du règne animal. Je vous partage quelques statistiques surprenantes, qui ont de quoi à nous faire sentir tout petit :

  • Quatre ordres d’insectes, soit les diptères, les hyménoptères, les lépidoptères et les coléoptères, constituent ensemble environ 65 % de toutes les espèces connues sur notre planète;
  • Les coléoptères représentent à eux seuls 24 % de toutes les espèces animales vivant sur la planète;
  • Il y a plus d’espèces de longicornes (une seule famille de coléoptères) que d’espèces d’oiseaux;
  • Il y a autant d’espèces de coccinelles qu’il y a d’espèces de mammifères;
  • Il y a plus d’espèces de charançons que d’espèces de poissons.

Malgré la prédominance des insectes sur notre planète, il reste étonnant, voire inquiétant, de constater qu’on en sait si peu sur ces derniers. En effet, alors qu’on a évalué l’état de vulnérabilité de la totalité des espèces d’oiseaux connus, ainsi que de la majorité des reptiles, amphibiens, poissons et mammifères, à peine 1 % des 1 053 578 insectes connus ont été examinés… Et sur ce lot, une espèce sur cinq est déjà considérée comme menacée. Qu’en serait-il si nous en évaluions davantage ?

Je suis par ailleurs attristée d’apprendre que, parmi mes insectes aquatiques préférés, toutes les espèces de plécoptères et d’éphémères qui ont été évaluées jusqu’à présent sont menacées ou éteintes. De plus, plusieurs espèces de libellules et de trichoptères affichent, elles aussi, un statut précaire. Tant d’espèces que je n’aurai jamais le bonheur d’observer !

La biodiversité des milieux aquatiques est également touchée par ce déclin.

Un déclin à l’échelle planétaire

Si ce déclin est généralisé, qu’est-ce qui peut en être la cause ?

Comme pour tout problème environnemental complexe, il n’y a pas qu’un seul facteur en jeu. Ceux qui sont le plus souvent cités dans les sources que j’ai consultées sont :

  • Les changements climatiques;
  • Les pesticides et les fertilisants, en particulier ceux utilisés en milieu agricole;
  • La fragmentation et la destruction des habitats naturels;
  • Les espèces exotiques envahissantes;
  • La pollution lumineuse.

Je pourrais écrire longuement sur les effets respectifs de ces facteurs sur la biodiversité des invertébrés, mais cela excède la portée de mon billet. Je vous invite à jeter un coup d’œil aux sources citées à la section « Pour en savoir plus » si vous êtes curieux !

Ce qui est important de retenir, c’est que les insectes et les autres invertébrés sont confrontés à une multitude de menaces qui, combinées, réduisent leurs chances de s’en sortir. Par exemple, une simple abeille butineuse peut être exposée, tour à tour, à des pesticides, à des parasites introduits, à un habitat fragmenté nécessitant des déplacements plus importants pour trouver les fleurs qu’elle préfère, à des aléas météorologiques auxquels elle n’est pas adaptée, et ainsi de suite ! Qui plus est, Goulson (2021) souligne que certains de ces facteurs conduisent à un effet synergique plus grand que la somme de chaque partie, ce qui aggrave davantage la situation.

Avons-nous des solutions ?

Il est facile de se sentir impuissant devant tous ces constats. Si les insectes, des êtres qui sont issus de millions d’années d’évolution, font face à de multiples menaces, que puis-je faire, moi, simple mortel ?

Plusieurs pistes sont proposées par les sources consultées (non exhaustives) :

  • Réduire l’utilisation de pesticides ou de fertilisants sur nos pelouses;
  • Opter pour des produits biologiques à l’épicerie, ce qui encouragera les entreprises agricoles à utiliser elles-mêmes moins de pesticides et de fertilisants;
  • Favoriser les aires fleuries dans nos cours et nos jardins;
  • Participer à des initiatives de science citoyenne qui permettent de suivre les populations d’organismes, de sensibiliser à leur sujet et de mieux les protéger. Voici quelques exemples près de nous : Cap sur les insectes, G3E, iNaturalist.
  • Diffuser l’information sur les insectes pour réduire les fausses perceptions et faire connaître le rôle crucial qu’ils jouent. Exemples québécois visibles sur les réseaux sociaux : Folles Bestioles, Le labyrinthe des insectes, La Bibitte Mobile, Photos d’insectes du Québec… et votre humble servante !
  • Exercer notre droit de vote en faveur d’une volonté d’action sur les facteurs contribuant au déclin des insectes.

Sur ce dernier point, Kolbert (2020) et Goulson (2021) montrent que la pression politique exercée par les citoyens peut mener à des changements notables. Ils citent l’Union européenne, qui a banni les néonicotinoïdes, une sorte de pesticides réputée avoir des effets nocifs notamment sur les abeilles, et le gouvernement allemand, qui a adopté un programme d’action pour la protection des insectes. De plus, la municipalité de Hudson, au Québec, est mentionnée comme étant la première municipalité nord-américaine à avoir interdit les pesticides en 1991. On lit sur le site de la municipalité (Ville d’Hudson, 2022) que l’exemple qu’elle a donné, en gagnant à la Cour Suprême contre des entreprises agricoles qui la poursuivaient, a encouragé plus de 125 autres villes et municipalités canadiennes, dont Toronto et Ottawa, à travailler sur l’abolition des pesticides.

En outre, de chaque petit pas émergent des solutions qui prennent de l’ampleur, pour éventuellement faire consensus entre de nombreux pays.

Cela nous ramène à la COP15 de 2022, à Montréal.

Cette dernière a été jugée un succès, malgré des négociations parfois ardues. En outre, les pays riches ont accepté de fournir 30 milliards de dollars aux pays pauvres pour mettre en œuvre les actions inscrites dans le plan. Parmi celles-ci, on retrouve l’objectif de protéger 30% des terres et des océans d’ici 2030. Présentement, 17% des terres et 8% des océans sont protégés.

Même si cela peut paraître peu – ou tard – pour certains, il s’agit d’une avancée significative dans la bonne direction.

La sensibilisation des jeunes et des moins jeunes est une action à notre portée. On voit ici une DocBébitte amusée devant de jeunes enthousiastes !

L’avocat du diable ou l’autre côté de la médaille

Vous saviez sans doute qu’une scientifique se cache derrière DocBébitte. Je ne pouvais vous présenter un sujet aussi important sans me demander s’il existait des études qui contredisent la tendance générale observée.

La réponse est… oui !

Ce constat n’est pas surprenant. En science, l’étude d’un objet aussi complexe qu’une communauté vivante peut donner lieu à une multitude de résultats différents. La nature de la communauté, sa structure, sa localisation sur notre planète, ainsi que sa sensibilité aux différents perturbateurs anthropiques et environnementaux, peuvent toutes influencer les résultats obtenus.

Ainsi, certaines études citées par Wagner et collab. (2021), ainsi que Goulson (2021) ont observé une absence de changement ou une augmentation dans l’abondance ou l’aire de distribution de groupes d’insectes :

  • Insectes des régions tempérées limités par les températures hivernales, qui s’étendent maintenant vers le nord en réponse à des températures plus clémentes;
  • Taxons associés aux humains et à l’urbanisation qui se dispersent avec eux;
  • Insectes aquatiques qui repeuplent les cours d’eau mieux protégés par des législations de type « Clean Water Act »;
  • Espèces colonisatrices – voire exotiques et envahissantes – qui augmentent leur aire de distribution;
  • Espèces natives soutenues par l’apparition de plantes introduites, qui deviennent une source de nourriture inespérée.

Il est important de souligner que le tableau n’est pas entièrement sombre. Cependant, il est indéniable que la biodiversité telle que nous l’avons connue jusqu’à présent est en train de changer, et il est difficile de prédire tous les effets qu’auront ces bouleversements sur notre quotidien.

Que vous soyez convaincus de la nécessité d’agir ou que vous hésitiez à croire dans l’ampleur du déclin annoncé, personnellement, je m’interroge : « Lèguera-t-on aux générations futures la biodiversité qui m’a tant émerveillée qu’elle continue chaque jour de m’inspirer à vous partager mes découvertes ? ».

Une jeune DocBébitte émerveillée devant un monarque, insecte qui est devenu un symbole de la protection de la biodiversité.

Pour en savoir plus

Festival des insectes 2018 : la tradition se poursuit

Le festival des insectes de Québec célébrait son 4e anniversaire cette année. C’est sur le site de l’Aquarium du Québec, à Québec, que se déroulait cet événement bien attendu par les entomologistes du coin.

Premier arrêt : kiosque de manipulation!
Premier arrêt : kiosque de manipulation!

J’ai manipulé cette blatte
J’ai manipulé cette blatte

Les années précédentes, j’étais présente non seulement comme entomologiste enthousiaste visitant les attraits du site, mais j’effectuais aussi du bénévolat, me permettant tantôt de manipuler bon nombre d’invertébrés exotiques, tantôt d’effectuer de brèves conférences sur des sujets passionnants (voir cette chronique de 2017). Cette année, j’ai pris un petit répit bien mérité en matière de bénévolat, mais je ne pouvais tout de même pas rater cet événement énergisant! Je me suis donc présentée comme simple visiteuse.

Plusieurs kiosques de manipulation d’invertébrés nous attendaient. J’ai personnellement manipulé deux scorpions, une mygale, un phasme, un diplopode gigantesque, ainsi qu’une grosse blatte (photo à l’appui)! Quelques chenilles, mantes et larves de ténébrions étaient également disponibles pour les aventureux.

Dans un autre pavillon, bon nombre de cadres exposaient des insectes naturalisés de toutes formes et couleurs pour le plaisir des yeux. Une dégustation de produits contenant des insectes était aussi possible. C’est ainsi que je me permis des jujubes aux grillons, ainsi qu’un biscuit aux grillons (photos à l’appui). Auriez-vous osé? Je suis encore bien vivante, quelques jours après ladite dégustation!

Finalement, un troisième pavillon permettait aux visiteurs d’acheter des insectes naturalisés et de les épingler eux-mêmes. Étant une piètre monteuse d’insectes – oui, je l’avoue, je n’ai pas une bonne dextérité… et probablement encore moins de patience! – je passai gentiment mon tour pour cette activité!

L’activité « grande absente » cette année : les conférences offertes par des entomologistes amateurs ou aguerris passionnés. Personnellement, j’adorais ces conférences, qui faisaient en sorte que je passais également plus de temps sur le site, à parfaire mes connaissances dans le domaine. Espérons que cette activité sera de retour l’an prochain… car je compte bien y être à nouveau!

Chambre noire des scorpions!
Chambre noire des scorpions!

Pas petites, ces mygales!
Pas petites, ces mygales!

Plusieurs cadres permettaient d’admirer des insectes fort colorés
Plusieurs cadres permettaient d’admirer des insectes fort colorés

Jujubes aux grillons et biscuit aux grillons
Jujubes aux grillons et biscuit aux grillons

Qu’est-ce qui est pire que de trouver un grillon dans son biscuit? Trouver une moitié de grillon!
Qu’est-ce qui est pire que de trouver un grillon dans son biscuit? Y trouver une moitié de grillon!

Un festival emballant!

Permettez-moi de faire une petite entorse à la programmation initialement prévue! Je vous fais languir encore une semaine de plus avant de vous présenter la chronique réponse associée à la devinette du lundi 20 avril pour vous parler d’un évènement récent : le 1er festival des insectes tenu à l’Aquarium du Québec, à Québec!

Theraphosidae bleue
Des espèces vivantes pouvaient être observées dans des vivariums

Mante et Caro
La manipulation d’insectes était fort populaire

Ce festival, qui avait lieu du 17 au 19 avril, est une initiative de La Bibitte mobile, une organisation qui se dévoue à la sensibilisation et à l’éducation des jeunes au monde des insectes. Misant beaucoup moi-même sur la sensibilisation et l’éducation dans le cadre de mon travail sur les milieux aquatiques, ainsi que pour mon blogue DocBébitte, je ne pouvais faire autrement que de les encourager! Par conséquent, je me suis « sacrifiée » de deux façons : 1) en me présentant samedi comme visiteuse et 2) en faisant du bénévolat toute la journée du dimanche! Les activités étaient diverses et mon seul regret est de ne pas avoir eu assez de temps pour tout voir et tout faire.

Premier élément au menu : animation humoristique par Victor l’Insecteur pour les enfants… ainsi que pour les grands enfants! Quelle merveille de voir tous ces jeunes, bouche béante, devant les récits et les « bébittes » vivantes de M. l’Insecteur. De petits entomologistes en devenir, sans aucun doute! L’animation ne s’arrêtait pas là et les visiteurs ont également pu assister à des présentations variées données par des entomologistes chevronnés dont la passion était indéniablement contagieuse : chasse aux insectes nocturnes, élevage de papillons, fabuleux monde des fourmis, échantillonnage de scarabées et j’en passe (comme je vous ai mentionné, je n’ai malheureusement pas tout vu)! Saviez-vous, par exemple, qu’il existe des fourmis à tête plate qui se servent justement de cet attribut pour boucher le trou de leur nid de sorte à éviter que des intrus y entrent? Ou encore qu’il est mieux d’attendre que les papillons de nuit, que l’on attire à l’aide d’un mélange sucré appelé « miellée », soient « saouls » avant de tenter de les capturer?

Dégustation grillon
Dégustation d’insectes en direct! Grillon à saveur de sel et vinaigre!

Cécropia volière
Une volière à papillons permettait de voir ces derniers de près

Autre point fort de l’évènement : la possibilité de manipuler plusieurs invertébrés vivants, activité très populaire – du moins si je me fie au petit groupe avec lequel j’ai fait la visite du samedi! Il était possible en outre de manipuler mantes, chenilles, mygales et papillons (voir cette vidéo de Radio-Canada à cet effet). Pour les visiteurs moins aventureux, moult invertébrés déjà morts pouvaient aussi être observés dans un grand nombre de présentoirs disposés à divers endroits sur le site de l’Aquarium.

La possibilité d’étaler soi-même un invertébré était également offerte. J’aurais bien aimé tenter ma chance, mais la journée tirait déjà à sa fin lorsque nous parvînmes à ce kiosque. Néanmoins, l’activité semble avoir été fort populaire auprès des visiteurs que l’on voyait déambuler sur le site avec « leurs » insectes étalés à la main!

Les insectes étaient aussi au menu, littéralement! Un kiosque proposait effectivement des insectes à déguster. Non seulement en fis-je la dégustation le samedi en tant que visiteuse, mais je me retrouvai bénévole à ce kiosque toute la journée du dimanche. Je peux vous dire qu’il y a beaucoup plus de gens que je pensais qui ne font pas la fine bouche! Même un ancien collègue de travail que je croyais dégoûté par les insectes s’est délecté (en fait, je ne suis pas certaine si le mot est bien choisi!) de grillons à saveur de bacon et fromage! De plus, certains visiteurs étaient même déçus qu’il n’y ait pas plus de choix, comme des insectes dans le chocolat, par exemple! Bravo, chers visiteurs, vous n’avez pas froid aux yeux!

En outre, il y avait une pléiade d’activités et beaucoup de visiteurs (petits et grands) souriants! Espérons que cet évènement se reproduise les prochaines années! Il s’agit d’une belle occasion d’ouvrir les horizons et de mieux faire connaître ces sympathiques invertébrés, trop souvent méconnus et mal-aimés! Serez-vous de la partie la prochaine fois?

Mygale et Caro
Une grosse journée de bénévolat récompensée par la manipulation d’une bête sympathique

 

Pour en savoir plus

 

 

Respire par le nez!

Si vous êtes une personne nerveuse comme moi, vous avez sans doute souvent entendu cette expression. Ce que l’on tend à oublier c’est que bien que nous, les humains, respirions par le nez, ce n’est pas le cas de tous les organismes vivants.

Ophiogomphus stigmate
Le « point » que vous voyez sur le thorax de cette libellule (Ophiogomphus sp.) est un stigmate (cliquer sur la photo pour l’agrandir)

La semaine dernière, je vous entretenais sur les stratégies adoptées par les insectes afin de respirer sous l’eau. J’avais brièvement abordé quelques notions concernant leur système respiratoire et il me semblait fort pertinent d’aborder plus longuement le sujet cette semaine. Question de battre le fer pendant qu’il est chaud, quoi!

Vous aurez donc compris que le premier fait à connaître est le suivant : les insectes ne respirent pas par le nez et ne possèdent pas de poumons. Ils sont plutôt dotés d’un réseau de trachées dont les ouvertures sur l’extérieur, les stigmates, sont habituellement situées le long de l’abdomen et sur le côté du thorax. Chez certains organismes comme les chenilles, les stigmates sont visibles à l’œil nu et forment une série de « points » le long des différents segments de l’abdomen. En revanche, certains groupes possèdent des stigmates situés à d’autres endroits : ceux des tipules sont situés dans leur arrière-train! Finalement, vous aurez compris à la lecture de la chronique de la semaine dernière que les invertébrés aquatiques ont opté pour d’autres stratégies où les stigmates ne sont pas nécessairement visibles (assimilation de l’oxygène par la peau et utilisation de branchies où les stigmates sont recouverts d’une membrane). On distingue d’ailleurs dans la littérature deux notions : le système respiratoire ouvert (stigmates visibles) et le système fermé (stigmates cachés sous une membrane).

Sphinx ondulé ventre
Les stigmates de cette chenille sont visibles sur le thorax et tout le long de l’abdomen

Tipulidae_derrière
Les tipules portent leurs stigmates au derrière (les deux grands cercles que vous voyez)!

À noter que vous entendrez le terme anglais spiracles, qui semble assez souvent utilisé en français pour désigner les stigmates. Certaines des sources francophones consultées pour la présente chronique (dont un livre publié) l’utilisent d’ailleurs, ce qui me fait interroger sur le meilleur terme à utiliser. Mes dictionnaires français m’indiquent une signification pour spiracles qui ne correspond pas à des ouvertures du système respiratoire des insectes. La traduction de l’anglais vers le français proposée dans Le Robert & Collins indique, quant à elle, que spiracle doit être traduit par stigmate. Conclusion de cette petite leçon de français : il faudrait utiliser le terme stigmate!

Les stigmates constituent des valves qui peuvent être ouvertes ou fermées au besoin. Vous avez sans doute déjà remarqué que les insectes peuvent survivre assez longtemps submergés. Je retrouve annuellement des invertébrés de toutes sortes dans ma piscine, que je crois morts. Or, je suis souvent surprise de les voir revenir à la vie. Cette résilience est expliquée par le fait que, lorsque submergés, les insectes vont fermer leurs stigmates de sorte à éviter que l’eau entre dans leur système respiratoire. Bien sûr, éventuellement, les réserves en oxygène se tarissent et l’individu ne peut plus survivre. Toutefois, il peut rester sous l’eau plus longtemps qu’un vertébré ne pourrait le faire. De la même façon, un insecte vivant dans le désert pourra choisir de fermer ses stigmates afin de réduire la perte d’eau.

Si la portion externe du système respiratoire des insectes est simple, il en est autrement pour la partie interne. Les trachées sont décrites comme un réseau de tubes qui parcoure tout le corps des insectes. Ces tubes, qui se divisent ensuite en de plus petites ramifications, les trachéoles, acheminent l’oxygène directement vers les tissus sous forme gazeuse. Les tissus ne sont donc pas alimentés en oxygène par le biais du sang, comme c’est le cas chez les vertébrés – mis à part les chironomes rouges qui possèdent de l’hémoglobine. Le dioxyde de carbone est évacué par ce même réseau, passant des tissus vers l’air. Selon une des sources consultées, les trachées peuvent aussi former à certains endroits des sacs bordés de muscles. La contraction de ces muscles contribuerait davantage à la circulation de l’oxygène.

Hanneton larve stigmates
Comme chez les chenilles, les stigmates de cette larve de hanneton sont visibles à l’œil nu

G. vastus stigmate
Stigmate d’une libellule (Gomphus vastus) vu de mon stéréomicroscope (cliquer pour agrandir)

S’ils n’ont pas de poumons pour inspirer et expirer l’air, comment les insectes respirent-ils? C’est en utilisant leurs muscles pour comprimer leur abdomen qu’ils expulsent l’air vicié de leur système respiratoire. Ensuite, le relâchement des muscles fait en sorte que l’air est aspiré à nouveau dans le réseau de trachées. Cela me fait penser à un jouet en caoutchouc pour enfant (un canard jaune, par exemple) sur lequel on pèse pour faire sortir l’air. Quand on relâche, l’air entre naturellement, sans nécessiter de mécanique supplémentaire. De la même façon, si les insectes dilatent, puis relâchent leur abdomen, le mouvement générera également une entrée et une sortie d’air. C’est le cas, notamment, des criquets. Vous les avez sans doute déjà observés, au repos, alors que leur abdomen s’élargissait et se rétractait. Ils « respiraient »!

Fait intéressant, ce système respiratoire, quoique étrange si on le compare au nôtre, n’est pas particulièrement performant. Comme l’insecte n’est pas muni d’une « pompe » en action constante, comme nos poumons, les individus s’avèrent limités dans la quantité d’air qu’ils peuvent faire circuler dans leur corps. Le taux de diffusion de l’oxygène par le système trachéal ne s’avèrerait pas, non plus, optimal. Cela a pour effet de défavoriser la prolifération des gros individus. C’est d’ailleurs à cause d’une composition atmosphérique passée plus riche en oxygène que certains insectes préhistoriques ont pu atteindre de grandes tailles – ce que l’on n’observe plus de nos jours. Ceci est malheureux pour les insectes, mais sans doute une bonne chose pour nous. Imaginez vivre auprès d’insectes qui atteindraient quelques mètres d’envergure!

 

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