Des pères exemplaires

Il y a un mois, à la fête des Mères, je vous avais parlé des mères invertébrées et du soin qu’elles procuraient à leurs rejetons. Dans le monde des invertébrés, il semble que ce soient plus souvent les mères que les pères qui s’occupent de leur progéniture. Toutefois, l’on retrouve tout de même plusieurs cas de pères exemplaires.

Un premier est celui de la punaise d’eau géante de la famille Belostomatidae. Les femelles du genre Belostoma, par exemple, agglutinent plus d’une centaine d’œufs sur le dos des mâles. Par la suite, ce sont eux seuls qui s’occupent « d’élever » les petits. Ils s’assurent que les œufs sont humides, mais aussi bien oxygénés en permanence. Pour ce faire, ils font notamment des mouvements avec leurs pattes postérieures de sorte à faire circuler l’eau au-dessus de leur dos. De plus, ils doivent demeurer à proximité de la surface de l’eau. Une des sources que j’ai consultées indique même qu’ils feraient régulièrement des « push-ups »! Finalement, en portant les œufs en permanence, ils s’assurent que les jeunes larves en devenir sont protégées des prédateurs.

Chez un autre genre de Belostomatidae, Lethocerus, la femelle pond les œufs sur une tige située hors de l’eau. Le mâle, encore une fois responsable du sain développement des jeunes, plonge constamment dans l’eau, puis grimpe sur la tige de sorte à dégoutter sur les œufs. Tout un manège! Par la même occasion, il chasse également les prédateurs.

Je n’ai pas encore eu la chance de prendre des clichés de ces jolies bêtes, mais je vous conseille de visionner cette courte vidéo disponible sur YouTube.

 

 

La majorité des soins paternels exclusifs (sans présence de la mère) est donnée par des espèces d’hémiptères (punaises). Seuls quelques autres groupes d’insectes seraient caractérisés par la présence d’un père dévoué à 100% à la tâche. C’est le cas de la guêpe fouisseuse Trypoxylon superbum (Sphecidae), où le mâle demeure seul dans le nid avec les œufs afin de les protéger de parasitisme ou de prédation.

Il existe cependant un plus grand nombre de situations où le père et la mère forment un duo afin d’élever et de protéger plus efficacement les enfants. C’est le cas de plusieurs sortes de coléoptères qui se nourrissent de sources éphémères comme les cadavres et les excréments. Quelques espèces de coquerelles et d’hyménoptères auraient aussi adopté cette stratégie. Chez certains groupes taxonomiques, les femelles se chargent de nourrir les larves, alors que les mâles s’assurent de la sécurité de la famille en chassant tout individu indésirable. Dans d’autres cas, les mâles parcourent les carcasses ramenées au nid pour nourrir les petits et les débarrassent des champignons. Finalement, il arrive que les deux parents soient tous deux responsables de l’alimentation des rejetons – que ce soit en leur rapportant de la nourriture ou en leur offrant de délicieux fluides corporels (ce qui inclut régurgitation et fèces… bon appétit!).

Fait intrigant, chez certains insectes, être un père exemplaire est considéré comme étant sexy! En particulier, chez une punaise assassine du genre Rhinocoris, les mâles se battent pour protéger des masses d’œufs déjà pondus. Les femelles jugent qu’un mâle en train de protéger des œufs est un valeureux individu qui protégera tous les œufs qu’il a conçus. Bref, elles le considèrent comme un bon père de famille et le choisissent donc comme partenaire!

Je ne pourrais terminer cette chronique sans souhaiter une belle fête des Pères à mon propre papa, qui, il faut le dire, a largement contribué à mon appréciation des petites bébittes de ce monde!

Caro pops et tortue
Un papa qui a encouragé sa fille à aimer les bébittes de toutes sortes!

 

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De bonnes mamans!

En cette semaine précédant la Fête des Mères, quoi de mieux qu’une chronique offrant une ode aux mamans… qu’elles soient vertébrées ou non? En effet, prodiguer des soins parentaux à sa progéniture afin de lui assurer un avenir adéquat n’est pas que l’apanage des humains. Non seulement de nombreux autres vertébrés prennent soin de leurs rejetons (mammifères, oiseaux, reptiles et poissons), mais plusieurs invertébrés le font également.

Le premier exemple qui vient à l’esprit est celui des araignées. N’avez-vous pas déjà aperçu une maman araignée protégeant son nid (prenant souvent la forme d’une boule ou d’une masse de soie remplie d’œufs)? Certaines araignées vont non seulement veiller sur leurs œufs, mais aussi les transporter partout avec elles. C’est notamment le cas des araignées-loup (Lycosidae), qui accrochent leurs œufs – une grosse boule de soie – à la base de leur abdomen.

Lycosidae et oeuf
Araignée-loup traînant ses oeufs au bout de son abdomen

Un second exemple de mère exemplaire provient d’une recherche récente qui a observé que certaines mères chrysomèles (coléoptère de la sous-famille des Chrysomelinae) protègent farouchement leurs œufs et leurs larves. La mère attaque tout ce qui s’approche de la feuille où se situent ses rejetons. Elle suit également ses larves de près, les empêchant de s’éloigner et de s’éparpiller. Plusieurs cas similaires existent : punaises à dentelle (hémiptère de la famille des Tingidae), mouches à scie (hyménoptère du sous-ordre Symphyta), cassides (coléoptère de la sous-famille des Cassidinae), etc. Dans tous ces cas, les mères défendent leur progéniture, souvent contre des ennemis plus puissants. Elles ne survivent donc pas nécessairement à l’attaque, mais offrent quelques précieuses minutes à leurs rejetons afin qu’ils trouvent un abri sûr.

En plus de protéger leurs jeunes, d’autres insectes se chargent également de les nourrir. Chez l’espèce cryptocerus punctulatus, une sorte de coquerelle vivant dans le bois mort, les deux parents protègent leur progéniture et assurent leur alimentation. En effet, étant donné que l’aliment de base (le bois) est difficile à digérer et peu riche en nutriments, les parents nourrissent les larves directement… à partir du contenu de leur anus! Les larves reçoivent ainsi une nourriture prétraitée et additionnée d’éléments nutritifs et de bactéries facilitant la digestion! Les mères perce-oreilles, quant à elles, mâcheraient la nourriture de leurs nouveau-nés et la régurgiteraient à leur intention. Ces insectes en font donc beaucoup pour assurer que leurs enfants soient bien nourris et en santé. On peut remercier nos parents de ne pas être allés tout à fait jusque là!

Araignée et oeufs
Araignée protégeant ses oeufs

Du côté des invertébrés marins (je n’en parle pas souvent, mais ce sont bien des invertébrés, eux aussi!), la pieuvre géante du Pacifique est un exemple extrême de soin maternel. La femelle s’isole dans une caverne sous-marine avec ses œufs. Elle s’assure en constance qu’ils sont protégés, bien aérés et exempts d’impuretés. Elle ne bougera, ni ne s’alimentera pendant toute cette période (cinq à six mois) et ira jusqu’à en mourir, sacrifice ultime pour s’assurer que ses rejetons aient toutes les chances devant eux. Je vous recommande de jeter un coup d’œil à cette vidéo à cet effet.

En outre, les mamans invertébrées mettront beaucoup d’énergie pour favoriser la survie de leurs petits. Elles méritent, comme nos mamans vertébrées à nous, qu’on leur souhaite « Bonne Fête des Mères »!

Pour couronner le tout, je profite de cette tribune pour souhaiter une « Bonne Fête des Mères  » toute spéciale à ma maman vertébrée à moi, qui m’a toujours encouragée à m’épanouir et à faire ce que j’aime dans la vie… même si cela signifie entre autres de parler de bébittes incessamment! Merci maman pour tout!

 

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