Cette conférence conviviale offre des astuces qui vous aideront à persuader votre entourage à apprécier ces petites bêtes… ou à mieux les tolérer vous-mêmes !
Cliquez sur le lien ci-dessous pour écouter la conférence. Bon visionnement !
La conférence a été réalisée sur Facebook le 25 mars 2023.
Plusieurs photographies de lecteurs DocBébitte ont été utilisées. Les crédits associés sont apposés directement sur les photos. Les photos non identifiées sont de Caroline Anderson ou d’Alexandre Roy.
Comme vous l’avez sans doute lu les semaines dernières, nous avons eu deux gagnantes ex aequo dans le cadre du concours amical de photo de cette année.
Cette semaine, je vous présente la seconde des photos gagnantes : l’araignée-loup par Céline Benoit Anderson.
Photo gagnante: l’araignée-loup par Céline Benoit Anderson
Sur le cliché de Céline, on voit une jolie araignée-loup (famille Lycosidae) femelle, qui trimbale son cocon rempli d’œufs. Je vous avais déjà dit que c’est parfois difficile d’identifier un spécimen à partir d’une photo, car nous n’avons pas toujours un bon aperçu des éléments qui permettent l’identification.
Comment alors savons-nous qu’il s’agit d’un lycosidé ? Il y a deux trucs !
La disposition des yeux aide à l’identification
Tout d’abord, la disposition des yeux est le principal critère à retenir pour distinguer les membres de la famille Lycosidae. Chez les araignées-loup, les quatre yeux antérieurs forment pratiquement une ligne droite. Aussi, les yeux postérieurs sont nettement plus gros que les yeux antérieurs et forment un rectangle ou un trapèze (selon les sources !) s’étalant vers le dessus de la tête (le céphalothorax). Cela fait en sorte que l’on voit souvent la paire d’yeux postérieurs latéraux lorsque l’on regarde l’araignée du dessus. C’est d’ailleurs ce que l’on peut voir sur la photo de Céline. Cet agencement est si propre aux lycosidés qu’il s’agit de la deuxième famille à pouvoir être discriminée lorsque l’on utilise la clé d’identification du guide de Paquin et Dupérré (2003).
Un autre bon indice est la façon dont les femelles portent leur sac d’œufs. Le cliché de Céline le représente très bien : les mamans transportent ce sac dans leurs filières, à l’arrière de leur corps. Il s’agit d’un comportement typique chez les araignées-loup.
Les lycosidés peuvent être d’assez grande taille (plus de 20 à 30 mm pour certaines espèces). Par conséquent, il arrive assez souvent qu’elles soient confondues avec les dolomèdes (famille Pisauridae), les plus grosses araignées que l’on peut trouver au Québec (j’ai écrit sur le sujet dans ce billet). L’agencement des yeux des dolomèdes se distingue toutefois des araignées-loup : la bande d’yeux postérieurs n’est pas alignée (sur mes photos et celles consultées sur Bug Guide, je constate que cette bande est généralement arquée vers l’arrière) et les yeux antérieurs ne forment pas de rectangle ou de trapèze. De plus, les femelles dolomèdes trimbalent leur sac d’œufs à l’avant, dans leurs chélicères.
On distingue les dolomèdes (à gauche) des lycosidés (à droite) en les regardant bien dans les yeux!
Il est peu probable que vous n’ayez jamais vu une araignée-loup. Il s’agit d’une araignée très commune, retrouvée dans une vaste gamme d’habitats. La plupart de ces arthropodes chassent au sol et ne tissent pas de toiles à l’instar des agélénidés ou des épeires. La disposition de leurs yeux fait qu’elles ont une très bonne vision. Elles ne poursuivent pas des proies activement, mais vont plutôt rester immobiles jusqu’à ce qu’un insecte (ou une autre araignée) passe à proximité. Lorsque le moment est propice, elles se jettent sur leur proie !
La vie au sol fait en sorte que ces arachnides constituent souvent une grande proportion des captures réalisées à l’aide de pièges-fosses. Justement, j’en retrouvais en grand nombre dans la piscine creusée que j’avais dans la cour de ma précédente demeure. C’est ainsi que j’appris à manipuler beaucoup d’araignées: je rescapais à la main les belles araignées-loup (et aussi passablement d’agélénidés) flottant encore à la surface. C’était un bon exercice pour moi qui, je l’avoue, souffrais d’arachnophobie (et je ne peux dire que j’en suis encore parfaitement guérie !). Les individus moins chanceux qui avaient eu le temps de se noyer se retrouvaient quant à eux dans ma collection faite de spécimens trouvés morts.
Cette femelle en a « plein le dos » avec la famille!
Comme vous l’avez constaté à la photographie gagnante, les lycosidés sont de bonnes mères. La femelle prend grand soin à transporter son sac d’œufs, ce qui inclut parfois de se promener entre les zones ensoleillées et ombragées pour s’assurer que les rejetons en devenir se développent à la bonne température. Une fois les petits sortis du cocon, la femelle continue de trimbaler sa précieuse cargaison pendant une à deux semaines. Cela offre la possibilité à des amateurs comme moi de prendre des clichés de femelles araignées dont le dos est bondé de rejetons. Des dizaines de petits araignons ! Une vue qui ferait hérisser le poil des bras d’arachnophobes, sans aucun doute !
Fait intéressant, en effectuant les recherches pour écrire le présent billet, je suis tombée sur une explication du nom « araignée-loup » qui a été donné à ce groupe d’arachnides. Paquin et Dupérré (2003) indiquent en effet que ce serait à la fois leur présence en grand nombre au sol, lors de journées ensoleillées, telle une meute de loups, mais également leur aspect velu, qui aurait inspiré le nom vernaculaire.
Et que dire de cet aspect velu ! La jolie araignée photographiée par Céline semble en effet faite en peluche ! Est-ce cette apparence qui lui a valu le coup de cœur du public ?
Qu’à cela ne tienne ! Félicitations à nouveau à Céline Benoit Anderson pour cette victoire ex aequo !
Et merci à nouveau à toutes les personnes qui ont soumis de superbes photos (que vous pouvez encore visionner ici) et à tous ceux qui ont pris le temps de voter pour leur photo préférée !
On se revoit l’année prochaine pour la dixième édition ?
La jolie araignée-loup est bien velue!
Pour en savoir plus
Bradley, R.A. 2013. Common spiders of North America. 271 p.
Cette année, la période de vote pour le concours de photographies m’aura tenu en haleine jusqu’à la toute dernière journée.
En effet, ce sont six photos, de six photographes différents, qui se sont fait la course côte à côte jusqu’à la toute fin ! Je croyais bien devoir vous annoncer six gagnants… mais les votes du dimanche 3 octobre, dernière journée où je recevais vos votes, furent déterminants.
Aussi, je suis bien heureuse de laisser le public voter et de m’abstenir de tout vote, puisque ce sont deux membres de ma famille qui ont gagné. Il faut dire que la pomme n’est pas tombée très loin de l’arbre et beaucoup de gens de mon entourage sont des amoureux de la nature et de la photographie; ils ont amplement participé au présent concours en transmettant plusieurs photos !
Vous avez également été bon nombre de lecteurs DocBébitte à soumettre de superbes clichés : tant qu’à moi, vous êtes tous gagnants et des dizaines d’amateurs auront vu passer vos magnifiques clichés ! On m’a même déjà parlé de certaines de vos photos sur lesquelles figurent tantôt des insectes moins connus, tantôt des invertébrés qui étaient fort abondants cet été ! Bravo et merci pour votre participation !
Comme promis, je m’affairerai à vous concocter non pas une, mais deux chroniques pour vous parler davantage des organismes qui figurent sur les deux photos gagnantes de cette année, soit :
La périthème délicate par Sylvie Benoit;
L’araignée-loup par Céline Benoit Anderson.
Avez-vous hâte d’en savoir plus sur ces bêtes pour lesquelles vous avez voté ?
La suite viendra sous peu !
Merci encore pour votre grande participation, tant par la soumission de photos que par vos votes ! Pour les clichés qui n’ont pas remporté la victoire, ce n’est que partie remise ! On se revoit l’an prochain ?
La périthème délicate de Sylvie Benoit a séduit plusieurs voteurs!
Est-ce l’apparence en peluche de cette araignée-loup qui a fait fondre les coeurs?
Les araignées. Ces arthropodes qui font bien plus souvent l’objet de peurs que d’admiration. Elles sont pourtant bien utiles et… partout!
C’est notamment en camping que l’on peut voir l’ampleur de leur omniprésence.
La semaine dernière, j’étais en camping à l’Île aux Lièvres, un superbe endroit que je recommande. Les observations de faune et de flore typiquement québécoises abondaient. Cela comprenait les organismes invertébrés, dont les araignées.
Second individu, également sous mes pantalons (Araneus nordmanni ou saevus)
Celle-ci était encore sur mes pantalons au moment de la photo (famille Gnaphosidae)
Non seulement elles arpentaient les murs et plafonds des somptueuses bécosses auxquelles nous avions accès (et où, j’ose le préciser, je ne me suis pas attardée à prendre de photos), elles se faufilaient un peu partout.
Je l’appris très bien lorsque j’eus à dénouer un pantalon que j’avais attaché à une table de pique-nique afin qu’il sèche pendant la nuit.
Cette araignée (genre Larinioides) a fui rapidement sur le côté de la table
Non pas une, ni deux araignées y avaient trouvé refuge… mais bien cinq beaux spécimens, dont un qui était particulièrement gros (un membre de la famille Agelenidae, autrefois classé dans la famille Amaurobiidae, faisant environ 2 cm).
J’ai beau avoir travaillé à me désensibiliser à la peur des araignées (voir cette chronique où j’en parle), ce dernier individu me fit lâcher un cri de petite fille apeurée, alors que je croyais avoir retiré toutes les araignées de mon pantalon. Je pris d’ailleurs un cliché de la bête, toujours dans mes pantalons, à côté du bouton, afin que vous appréciiez sa taille. Jolie, n’est-ce pas?
Bien que l’on observe plus souvent les groupes d’araignées qui se tiennent bien tranquilles dans lestoiles qu’elles ont tissées (les agélénidés ou les épeires, par exemple), il faut savoir que plusieurs espèces d’araignées se déplacent et chassent leurs proies au sol ou sur divers supports (arbres, murs, etc.), particulièrement pendant la nuit. De même, les mâles de taxons tisseurs de toiles, comme le genre Agelenopsis, se déplacent fréquemment au sol, sans doute à la recherche d’une compagne.
Le jour venu, ces charmantes bêtes se cherchent un abri… lequel peut s’avérer être des vêtements lâchement laissés sur une table pendant la nuit!
Grosse araignée qui demeurait cachée dans l’une des jambes de mon pantalon (Agelenidae du genre Coras ou Wadotes)
Même spécimen, encore dans mes pantalons
Tout cela étant dit, je ne vous déconseille pas d’aller faire du camping, loin de là! Mais n’oubliez pas de bien secouer et vérifier les vêtements que vous auriez laissé traîner hors de la tente avant de les enfiler! Quelques surprises pourraient s’y cacher!
Remerciements
Je tiens à remercier les membres de la page Facebook Araignées du Québec pour leur aide à l’identification des organismes photographiés, lorsque cela était possible. La luminosité n’était pas optimale (sous couvert forestier) et les individus ont fui rapidement une fois dévoilés!
Pour en savoir plus
Bradley, R.A. 2013. Common spiders of North America. 271 p.
Paquin, P. et N. Dupérré. 2003. Guide d’identification des araignées (Araneae) du Québec. 251 p.