En vogue, ce concept est de plus en plus connu et porte sur l’alimentation basée sur les insectes.
Dans cette toute nouvelle capsule vidéo, je vous parle brièvement d’entomophagie, mais surtout d’une expérience que j’ai vécue l’été dernier au congrès annuel de l’Association des entomologistes amateurs du Québec.
Qu’y ai-je fait ? Vous l’avez deviné : j’ai mangé deux espèces de fourmis, vivantes.
Une goûtait la citronnelle (genre Lasius), alors que l’autre goûtait le poivre (probablement le genre Aphaenogaster).
Venez jeter un coup d’œil à la vidéo… et me dire si, vous, vous oseriez !
Bon appétit!
Pour en savoir plus
Insectes Intrinsekt. Protéine durable et engrais organique. https://www.intrinsekt.com/ (page consultée le 11 décembre 2022).
Plus tôt cet été, une lectrice m’a écrit au sujet d’une observation singulière : des chenilles qui réagissent à l’unisson face à des cris et des sons soudains. Elle s’interrogeait sur la nature de cette réaction et son but.
Cette observation, soutenue par des vidéos disponibles sur YouTube, dont celle-cimettant en vedette lalivrée des forêts, a en effet de quoi à surprendre.
Mais pourquoi donc ces chenilles gigotaient-elles de la sorte ?
La livrée des forêts a fait l’objet de la vidéo YouTube mentionnée en début de chronique
J’ai feuilleté mes livres d’entomologie sans trouver de réponse claire…
Pourtant, j’ai découvert en fouillant sur Internet, en particulier dans des articles de périodiques scientifiques, qu’il s’agissait d’une réaction bien connue des chercheurs.
Effectivement, plusieurs articles scientifiques, dont quelques-uns cités dans la section « Pour en savoir plus » ci-dessous, rapportent des réactions de différentes espèces de chenilles – dont la très connue chenille du monarque – à diverses fréquences sonores. Les réactions sont déclenchées par une vaste gamme de sons incluant la voix humaine, la toux, les claquements de main, le trafic autoroutier et les avions.
Les réactions des chenilles à ces sons sont également variées. En plus des chenilles qui « dansent » et se tortillent, certaines peuvent entre autres figer, se laisser tomber au sol, contracter leur corps ou agiter des appendices d’apparence tentaculaires (exemple de l’espèce Furcula borealis).
Mais pourquoi donc afficher de telles réactions ?
Il semble que la réaction des chenilles aux sons subits ne soit rien de moins… qu’une stratégie de défense !
En effet, selon les sources consultées, les fréquences mises en cause concordent à celles produites par des prédateurs et des parasitoïdes aériens, plus particulièrement au son généré par le battement de leurs ailes.
La chenille du monarque peut, elle aussi, réagir aux sons soudains
Si l’on revient aux mouvements brusques mentionnés au début du présent billet, ils auraient donc pour effet de dérouter ou de secouer les invertébrés prédateurs ou parasitoïdes, qui ne seraient pas en mesure de compléter leur besogne. Par exemple, un insecte parasitoïde aura de la difficulté à pondre son œuf sur une proie qui se secoue. Et, fait intéressant, les études semblent démontrer que les fréquences auxquelles les chenilles sont les plus sensibles correspondent à celles émises par bon nombre de diptères et d’hyménoptères – des groupes qui comprennent plusieurs prédateurs et parasitoïdes de lépidoptères.
Vraisemblablement, la fréquence sonore générée par les cris d’un humain correspond à celle émise par ces prédateurs et parasitoïdes… et déclencherait donc le « déhanchement » noté chez les chenilles.
Les insectes ont sorti le bout de leur nez… et c’est le temps de l’année où je reçois une quantité grandissante de demandes d’aide d’identification !
Ma curiosité a été « piquée » la semaine dernière – sans mauvais jeu de mots ! – par mon cousin qui a observé une très grosse guêpe à son milieu de travail, à Notre-Dame-de-l’Île-Perrot. Souhaitant savoir s’il s’agissait d’un frelon et s’il y avait des raisons de s’inquiéter, il me transmit des clichés, pris par un collègue, qui accompagnent la présente chronique.
La photo initiale prise par le collègue de mon cousin: un frelon européen (Vespa crabro)!
Dans le dernier mois, j’ai remarqué sur les réseaux sociaux une certaine préoccupation en regard de frelons observés justement dans le sud-ouest du Québec… Les inquiétudes tournaient surtout autour d’un certain frelon asiatique géant introduit au Canada et qui serait soi-disant meurtrier.
Quand on utilise des termes aussi alarmistes que « meurtrier », la scientifique en moi ne peut faire autrement qu’avoir un doute et chercher à vérifier la véracité des dires ! Ainsi, j’entrepris à la fois d’identifier l’individu sur les photos transmises par mon cousin, mais également de plonger davantage dans le monde des frelons, un insecte que je n’avais pas encore abordé.
Qu’y trouvai-je ?
Premièrement, l’identité de l’hyménoptère photographié par le collègue de mon cousin : le frelon européen (Vespa crabro). Deuxièmement, plus de renseignements sur les observations reliées au fameux frelon asiatique géant (Vespa mandarinia).
Commençons par le frelon européen.
Ce frelon est une espèce introduite. Il a été observé pour la première fois au Québec à Aylmer, en 2004, et est rencontré chaque année depuis, en particulier dans le sud-ouest de la province. Il tend à attirer l’attention, car il est beaucoup plus gros que ses congénères indigènes. Alors que nos guêpes sociales québécoises mesurent entre 7 à 18 mm, reines incluses, une ouvrière du frelon européen mesure entre 18 à 25 mm… et la reine atteint un remarquable 35 à 40 mm !
À l’instar des guêpes sociales indigènes, comme les guêpes à taches blanches ou les guêpes communes, le frelon européen construit un nid de papier grisâtre. Il préfère ériger son nid dans des cavités existantes, par exemple le creux d’un arbre ou une cavité dans un mur. Il protège son nid contre les intrus et c’est généralement en s’en approchant trop qu’on finit par se faire piquer. En effet, il semblerait autrement que ce frelon ne soit pas particulièrement agressif.
La taille du frelon européen est impressionnante – et un critère pour l’identification.
Qu’en est-il de sa piqûre ?
Les sources que j’ai consultées indiquent que celle-ci est douloureuse, à cause de la taille de l’insecte et de son aiguillon. Néanmoins, sa piqûre n’est pas mortelle, sauf bien sûr si vous souffrez d’allergies aux guêpes et aux autres hyménoptères.
Le frelon européen se rencontre surtout dans les boisés ou à proximité de ces derniers. Il peut être actif la nuit et, par conséquent, on peut l’observer aux pièges lumineux.
Il se nourrit principalement d’arthropodes, dont des araignées et différents insectes, ainsi que de sève, ce qui ressemble au frelon asiatique géant, bien que celui-ci suscite davantage de préoccupations…
Parlons-en, du frelon asiatique géant !
Une première préoccupation liée à l’arrivée de ce frelon au Canada porte sur ses habitudes alimentaires : il se délecte d’insectes et particulièrement d’abeilles domestiques. Il serait susceptible de décimer certaines colonies d’abeilles… elles qui semblent hélas déjà éprouver des difficultés ces dernières années !
Une seconde préoccupation réside dans le terme « meurtrier » qu’on lui attribue. Le frelon asiatique géant est-il à craindre ? Dans les sources citées plus bas, je note peu d’information au sujet de la nature « meurtrière » de ce frelon. Cependant, je lis qu’une sous-espèce de ce frelon – le frelon géant japonais (Vespa Mandarinia japonica) – est connue au Japon pour son agressivité marquée, où 30 à 50 décès auraient lieu chaque année à cause de ses attaques. Considérant la densité de population du Japon et le risque accru de contacts avec les insectes, il est fort à parier que la situation pourrait s’avérer moins critique ici, au Québec. Toutefois, la taille impressionnante du frelon asiatique géant est liée à une quantité plus élevée de venin susceptible d’être injectée lors d’une piqûre. Les gens plus sensibles à ce venin seraient par conséquent davantage à risque. Sans être alarmiste, donc, précaution est de mise !
Pourquoi le nom géant ? Cet arthropode constitue non seulement le plus gros frelon du monde, il est aussi la plus grande espèce d’insectes sociaux connue. Les ouvrières mesurent de 25 à 40 mm, alors que la reine fait de 45 à 55 mm.
Au moment de rédiger la présente chronique, le frelon asiatique géant n’a pas encore été aperçu au Québec. Il a été observé en 2019 dans l’État de Washington (États-Unis) et à Nanaimo en Colombie-Britannique. En 2020, il a été repéré à nouveau à Langley, en Colombie-Britannique et à Custer, dans l’État de Washington. C’est dans ce même État, en octobre 2020, qu’un nid a été détruit. Dans les sources consultées, je n’ai pas trouvé de précisions sur des observations effectuées en 2021 ou 2022.
Selon Étienne Normandin dans cette entrevue, le frelon asiatique géant – tout comme d’autres espèces exotiques envahissantes – peut être introduit en se faufilant dans la cargaison des bateaux qui entrent au pays. Les villes portuaires comme Montréal pourraient donc se retrouver en tête de lice pour abriter un des premiers foyers de l’Est canadien.
Sans être alarmiste, il faut demeurer vigilant et c’est pourquoi des vérifications d’identité – comme mon cousin l’a fait – sont toujours de bonnes idées !
Si l’on veut demeurer vigilant, comment donc procéder pour différencier le frelon asiatique géant des autres hyménoptères déjà installés au Québec ?
Tout d’abord, l’outil d’identification disponible sur iNaturalistest déjà un bon début. Cet outil est performant pour identifier les organismes pris en photo. Selon la qualité de la photo ou selon le nombre d’espèces qui peuvent se ressembler, l’outil peut néanmoins demander de faire davantage de vérifications. Dans ce contexte, vous pouvez vous référer à d’excellents services d’identification comme le service de renseignements entomologiques d’Espace pour la vie. Par ailleurs, il me fera plaisir de vous soutenir au besoin, bien que DocBébitte soit une initiative sur mon temps personnel et que la réponse pourrait vous parvenir moins rapidement que pour les services susmentionnés. Vous en serez avertis !
Pour l’identification, les éléments suivants sont ce à quoi vous devez porter attention (notez qu’il y a des clés d’identification plus poussées et qu’il s’agit ici de quelques astuces générales) :
1) La taille de l’insecte.
Lorsque la taille atteint environ 20 mm ou plus, il s’agit d’une des deux espèces de frelons mentionnées ci-dessus. La guêpe à taches blanches est aussi passablement grosse en apparence (18 mm) et les plus gros individus rivalisent avec les plus petits du frelon européen. Il faut passer à l’étape suivante pour les distinguer.
2) La couleur de l’insecte.
La guêpe à taches blanches est de coloration jaune-blanchâtre et noire, incluant son visage (voir cette photo). Chez le frelon européen, la teinte du visage, qui oscille entre l’ocre et le brun roux, s’en distingue. Certaines marques rousses ou rougeâtres sont aussi présentes sur le thorax, bien que je remarque qu’elles sont plus ou moins prononcées selon les individus (observation basée sur les photos examinées dans les sources citées ci-dessous).
Néanmoins, le frelon asiatique géant peut aussi avoir des touches de roux au niveau du visage, où le jaune domine. Pour s’assurer de bien distinguer les deux frelons, il faut examiner d’autres critères, dont les motifs de l’abdomen. L’abdomen du frelon asiatique géant est caractérisé par une succession de bandes noires et jaune-orangé, relativement droites. En revanche, les derniers segments de l’abdomen du frelon européen sont généralement majoritairement jaunes et flanqués de taches noires situées environ au premier et troisième tiers de l’abdomen (vue dorsale – cet exemple).
Le visage, les antennes et les pattes qui présentent tous des teintes de roux sont aussi des critères utiles pour l’identification du frelon européen.
En cas de doute, il ne faut pas hésiter à photographier vos observations et les faire identifier par les services suggérés plus haut. Une détection rapide du frelon asiatique géant, s’il finit par apparaître au Québec, est la meilleure solution à un contrôle efficace de cette espèce.
D’ici là, doit-on s’inquiéter ? Selon Étienne Normandin, dans l’entrevue mentionnée plus haut, nos hivers plus rigoureux que ceux de l’ouest du pays pourraient limiter l’installation de futurs frelons asiatiques géants. Il n’en demeure pas moins que prudence est de mise ! Et qu’on peut se fier à tous ceux d’entre vous qui gardent un œil attentif sur les insectes qui nous entourent !