Histoire d’une photo… ou deux! Ranatre à l’affut!

Parfois, une photo cache des trésors.

L’été dernier, M. Régent Lehouillier, que plusieurs connaissent sans doute à cause de son implication sur les réseaux sociaux, dont Nos amis les insectes (Du Québec), a publié quelques photos où se cachait toujours une ranatre.

Connaissez-vous les ranatres?

Aussi appelées « scorpions d’eau », il s’agit de punaises effilées munies de pattes ressemblant à celles d’une mante religieuse. Ce sont de voraces prédateurs vivant en eaux douces. J’en ai parlé plus longuement dans cette chronique.

Regardez la brindille sous le ventre de la grenouille… il s’agit d’une ranatre! Cliquez sur la photo pour la visionner plein écran.

Dans les premiers clichés publiés par M. Lehouillier, on pouvait apercevoir une ranatre près d’une grenouille, mais également une seconde, immobile, agrippée à une tige submergée sous des libellules en période d’accouplement. Dans tous les cas, les ranatres n’étaient pas le premier objet de la photo et semblent n’avoir été aperçues que par la suite.

Sous ces libellules, submergée, se cache une autre ranatre!

Fait intéressant, l’individu accroché à la tige submergée semblait avoir trouvé un site parfait pour tendre une embuscade aux libellules occupées à se reproduire. Plusieurs espèces de libellules pénètrent en effet dans l’eau pour y déposer leurs œufs (j’en parle ici). Ainsi, quoi de mieux pour un vorace prédateur que d’attendre un repas qui viendra tout bonnement à lui?

D’ailleurs, M. Lehouillier a eu la générosité de me transmettre la suite de ses observations… où la ranatre tente de s’emparer d’une libellule. Ces photos, visibles dans le carrousel de photos ci-dessous, témoignent d’un combat ranatre contre libellule que peu de gens ont eu la chance d’observer.

Fascinant, n’est-ce pas?

Carrousel de photos – Cliquez sur une photo pour démarrer le visionnement. En tout temps, regardez bien et vous verrez, sous l’eau, le scorpion d’eau. À quelques occasions, ses pattes et sa tête sortent même de l’eau, alors qu’il est agrippé à la libellule du bas – la femelle –,qui se débat.

Pour en savoir plus

  • Merritt, R.W. et K.W. Cummins. 1996. Aquatic insects of North America. 862 p.
  • Moisan, J. 2010. Guide d’identification des principaux macroinvertébrés benthiques d’eau douce du Québec, 2010 – Surveillance volontaire des cours d’eau peu profonds. 82 p. Disponible en ligne : http://www.mddelcc.gouv.qc.ca/eau/eco_aqua/macroinvertebre/guide.pdf
  • Thorp, J.H., et A.P. Covich. 2001. Ecology and Classification of North American Freshwater Invertebrates. 1056 p.
  • Voshell, J.R. 2002. A guide to common freshwater invertebrates of North America. 442 p.

Une collection d’insectes… sans en tuer directement?

Faire une collection d’insectes (et autres invertébrés) sans tuer de nouveaux organismes, est-ce possible?

Oui, pourquoi pas!

C’est ce que je vous présente dans le cadre de cette vidéo prise lors d’un Facebook Live le 11 décembre 2021.

Je vous donne quelques conseils pour savoir où regarder… et je vous montre des spécimens à l’appui! Le tout appuyé de quelques sympathiques anecdotes!

Bon visionnement!

Gagnante ex aequo 2021, partie 1 : La périthème délicate par Sylvie Benoit

La semaine dernière, je vous annonçais les deux gagnantes ex aequo du concours amical de photographie DocBébitte. Cette semaine, je vous entretiens au sujet de l’insecte représenté sur le premier des deux clichés gagnants : la périthème délicate.

Photo gagnante: la périthème délicate par Sylvie Benoit

Cette photo de Sylvie Benoit est une belle découverte pour moi. Lors de la soumission de sa photo, Sylvie me suggérait qu’il pourrait s’agir d’une espèce de sympétrum. En fouillant dans mes livres et sur le site des libellules du Québec, je demeurais cependant sceptique : les ailes ambrées et les pattes orangées ne cadraient pas avec les espèces de sympétrum retrouvées au Québec.

En cherchant davantage dans le guide de Paulson (2011), je trouvai qui était cette belle inconnue : la périthème délicate (Perithemis tenera). Reconnaissable justement par ses ailes ambrées et ses pattes orangées, il faut ajouter que cette libellule a peu fréquemment été observée au Québec, outre quelques occurrences tout au sud de la province (Entomofaune du Québec Inc. 2008-2021; Savard 2011). Cela concorde bien avec l’observation de Sylvie faite au Parc National de Plaisance, situé au sud du Québec et près des frontières ontariennes.

Les motifs de couleur sur l’abdomen constituent un autre indice qui aide à l’identification. Dans le cadre du concours de photographie, j’utilise les photos telles qu’elles m’ont été envoyées. Par contre, en effectuant un traitement « post-concours » sur le cliché (que je joins dans le présent billet, côte à côte avec la photo originale), on voit apparaître des motifs plus pâles le long de l’abdomen (voir aussi ce cliché de Bug Guide). Ces motifs, combinés à la couleur des ailes et des pattes, permettent d’identifier sans contredit que nous avons devant nous un mâle périthème délicate.

La femelle, de son côté, est assez distincte du mâle. Ses ailes, qui ne sont pas aussi ambrées, sont également flanquées de taches sombres (voir cette photo de Bug Guide).

Quelques ajustements dans la couleur de la photo font ressortir la teinte du visage et de légers motifs sur l’abdomen

Je n’avais pas réalisé la petite taille qu’avait cet insecte avant d’examiner des photos sur le site Bug Guide. La périthème délicate doit peut-être son nom au fait qu’elle semble en effet toute menue et frêle, du haut de ses 20 à 25 mm (ce qui est petit pour une libellule). Il s’agit d’ailleurs d’un autre critère utile à son identification.

La toute petite périthème n’est toutefois pas si douce : les mâles protègent farouchement leur territoire, d’un diamètre allant de 3 à 6 mètres. Il arrive même que Messieurs décident de « capturer » d’autres mâles en tandem afin de les empêcher de flirter avec les femelles du coin (le tandem est la position que prend le mâle et la femelle qui s’accouplent – j’en parle ici).

Les mâles qui parviennent à se trouver une compagne copulent brièvement : une moyenne de 17 secondes selon Paulson (2011). Eh oui, il faut croire que quelqu’un s’est amusé à chronométrer des libellules en pleine copulation !

Les œufs fécondés sont pondus sur des objets humides situés à l’interface entre l’air et l’eau, comme des herbiers flottants de plantes aquatiques ou des troncs partiellement submergés. Il s’agit d’habitats davantage lentiques, c’est-à-dire où le courant est faible : lacs, étangs et bras de rivières calmes. C’est dans ce milieu que vont évoluer les naïades qui, comme toute naïade de libellule qui se respecte, s’avèrent être de voraces prédateurs. À l’instar des adultes, les naïades sont petites et font 15 mm à maturité.

Fait intéressant, les sources que j’ai consultées indiquent que la périthème délicate est une bonne imitatrice. Les deux sexes, mais particulièrement les femelles, auraient développé une certaine expertise pour imiter les guêpes ! Avec leur corps un peu plus foncé et parsemé de lignes jaunes, elles hocheraient leur abdomen ou leurs ailes de sorte à ressembler aux guêpes : des insectes nettement moins désirables aux yeux des prédateurs ! Leur petite taille, approchant celle des guêpes, ajoute au subterfuge et elles sont même en mesure de confondre quelques entomologistes en herbe ! Gardez donc l’œil ouvert !

Voilà qui complète cette première chronique de deux visant à mettre en vedette les taxons qui figurent sur les photos de nos deux gagnantes de cette année.

Félicitations à nouveau à Sylvie Benoit pour cette victoire ex aequo et merci encore à tous ceux qui ont voté !

Pour en savoir plus

  • Bug Guide. Species Perithemis tenera – Eastern Amberwing. https://bugguide.net/node/view/8058 (page consultée le 11 octobre 2021).
  • Entomofaune du Québec, Inc. 1988-2021. Les libellules du Québec – Liste des espèces. http://entomofaune.qc.ca/entomofaune/odonates/Liste_especes.html (page consultée le 6 octobre 2021).
  • Evans, A.V. 2008. Field guide to insects and spiders of North America. 497 p.
  • Hutchinson, R. et B. Ménard. 2016. Naïades et exuvies des libellules du Québec: clé de détermination des genres. 71 pages.
  • Paulson, D. 2011. Dragonflies and damselflies of the East. 538 p.
  • Savard, M. 2011. Atlas préliminaire des libellules du Québec (Odonata). 53 p.

Deux gagnantes ex aequo pour le concours de photo 2021 !

Cette année, la période de vote pour le concours de photographies m’aura tenu en haleine jusqu’à la toute dernière journée.

En effet, ce sont six photos, de six photographes différents, qui se sont fait la course côte à côte jusqu’à la toute fin ! Je croyais bien devoir vous annoncer six gagnants… mais les votes du dimanche 3 octobre, dernière journée où je recevais vos votes, furent déterminants.

Aussi, je suis bien heureuse de laisser le public voter et de m’abstenir de tout vote, puisque ce sont deux membres de ma famille qui ont gagné. Il faut dire que la pomme n’est pas tombée très loin de l’arbre et beaucoup de gens de mon entourage sont des amoureux de la nature et de la photographie; ils ont amplement participé au présent concours en transmettant plusieurs photos !

Vous avez également été bon nombre de lecteurs DocBébitte à soumettre de superbes clichés : tant qu’à moi, vous êtes tous gagnants et des dizaines d’amateurs auront vu passer vos magnifiques clichés ! On m’a même déjà parlé de certaines de vos photos sur lesquelles figurent tantôt des insectes moins connus, tantôt des invertébrés qui étaient fort abondants cet été ! Bravo et merci pour votre participation !

Comme promis, je m’affairerai à vous concocter non pas une, mais deux chroniques pour vous parler davantage des organismes qui figurent sur les deux photos gagnantes de cette année, soit :

  • La périthème délicate par Sylvie Benoit;
  • L’araignée-loup par Céline Benoit Anderson.

Avez-vous hâte d’en savoir plus sur ces bêtes pour lesquelles vous avez voté ?

La suite viendra sous peu !

Merci encore pour votre grande participation, tant par la soumission de photos que par vos votes ! Pour les clichés qui n’ont pas remporté la victoire, ce n’est que partie remise ! On se revoit l’an prochain ?

La périthème délicate de Sylvie Benoit a séduit plusieurs voteurs!
Est-ce l’apparence en peluche de cette araignée-loup qui a fait fondre les coeurs?

Capsule vidéo: Incursion au marais!

Comme vous le savez, j’ai récemment ajouté à l’offre DocBébitte la réalisation de capsules vidéo.

La semaine dernière, je lançais la plus récente d’entre elles: une incursion au marais.

Tournée au marais Léon-Provancher, vous y verrez une DocBébitte qui vous présente quelques invertébrés aquatiques: naïades de libellules et d’éphémères, gyrins, escargots et autres!

En sus, une petite surprise d’un organisme non invertébré qui aura su distraire quelques instants mon caméraman (mon conjoint, que je remercie d’ailleurs)!

Bon visionnement!